Le coup de semonce des cheminots mobilisés en masse
Venus de toute la France, plus de 25 000 agents de la SNCF ont réussi haut la main la première étape de leur mobilisation contre la réforme.
Rarement le parvis de la gare de l’Est et les artères adjacentes auront vu autant de monde.
Plus de 25 000 cheminots s’y sont donné rendez-vous jeudi, avant que le cortège ne s’ébranle jusqu’à la place de la Bastille.
Entre les fumées des torches et au son des sifflets, qui d’ordinaire annoncent le départ ou l’arrivée d’un train en gare, les agents de la SNCF sont venus crier leur colère contre une réforme gouvernementale qui « détruit le service public et nos acquis sociaux », s’indigne l’un d’entre eux, gilet CGT sur le dos et drapeau à la main.
« Aujourd’hui, notre mobilisation est un avertissement et la logique veut que cette manifestation soit historique », explique Nicolas Sinata, contrôleur à Caen et syndiqué SUD rail.
Venu avec une cinquantaine de ses collègues jusqu’à Paris, il sait que cette bataille est primordiale pour le futur, « c’est un peu vaincre ou mourir ».
La présence de cheminots européens dans le cortège
Coup d’envoi d’un mouvement de grève inédit de deux jours sur cinq pendant trois mois, la mobilisation de jeudi a consacré – une fois n’est pas coutume – l’unité syndicale cheminote.
« L’objectif est de faire un maximum de présence et de répéter que nous ne sommes pas responsables de la dégradation du service rendu au public », note Pablo, délégué syndical central CFDT à Dijon.
« Maintenant, il faut tenir pendant trois mois dans l’unité, c’est essentiel.
Il faut lutter contre la précarisation de nos métiers et rappeler la spécificité de nos missions », poursuit-il avant de conclure, sourire aux lèvres : « T’imagines un aiguilleur du ciel intérimaire ? »
Au hasard du défilé, les cheminots racontent aussi leur colère contre ceux, médias dominants et responsables politiques, qui voudraient les faire passer pour des favorisés du système.
« Nantis, aristocrates, privilégiés, les qualificatifs sont scandaleux ! » a dénoncé Laurent Brun au micro, face à la foule.
Ovationné, le secrétaire général de la fédération CGT des cheminots en a profité pour saluer la présence de cheminots européens – « anglais, suisses, allemands, espagnols, belges, luxembourgeois » –, venus soutenir la lutte de leurs collègues du rail français.
Veste de la CGSP (Centrale générale des services publics – Belgique) sur les épaules, Florent a fait le déplacement depuis Verviers.
« On est venus à trois cars, c’est important d’être là, parce que nous sommes dans le même merdier », témoigne cet ancien soudeur des chemins de fer belges.
Ouverture à la concurrence, privatisation des entreprises publiques historiques, casse du statut des agents, pour lui comme pour beaucoup d’autres, la bataille doit être « européenne ».
À ses côtés, un autre cheminot belge se prend même à espérer « une grève générale dans toute l’Europe ».
Trains supprimés, manifestants à quai, la direction de la SNCF, face à l’ampleur de la mobilisation des cheminots, a décidé de les empêcher de rejoindre Paris.
« Tous les trains qui nous faisaient arriver entre 11 h 30 et 14 heures à Paris ont été supprimés sans justification », témoignait, hier, un cheminot de province.
En tout près de 6 000 manifestants auraient ainsi été bloqués, « obligés de se mobiliser dans leurs territoires », a lancé Laurent Brun.
Mais, dans sa volonté de casser le mouvement, la direction va plus loin, par exemple en allant « chercher dans les ateliers de Temple Mills à Leyton (Royaume-Uni – NDLR) des volontaires pour travailler dans les ateliers du Landy et remplacer les grévistes », a révélé le secrétaire général de la CGT cheminots.
Des méthodes de « casseur de grève du XIXe siècle », loin, très loin des grands discours sur la « concertation responsable » prônée par Guillaume Pepy depuis l’annonce de la réforme.
Le coup de semonce des cheminots mobilisés en masse
Venus de toute la France, plus de 25 000 agents de la SNCF ont réussi haut la main la première étape de leur mobilisation contre la réforme.
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