Succès historique de la grève générale au Portugal à l'appel de la seule CGTP
Succès historique de la grève générale au Portugal à l'appel de la seule CGTP : « une des plus grandes grèves depuis la révolution des œillets »
« Une des plus grandes grèves depuis la révolution des œillets »
Article MO/AC pour http://solidarite-internationale-pcf.over-blog.net/
« Une des plus grandes grèves depuis la révolution d'Avril », c'est ainsi que le secrétaire de la CGTP Arménio Carlos a qualifié la grève générale du 14 novembre, une ripostecontre l’intensification de l’offensive anti-sociale menée par le gouvernement portugais, sous le mandat de la troïka FMI-UE-BCE.
Plus nombreux qu'en mars dernier, peut-être plus que jamais, les travailleurs ont suivi l’appel de la CGTP dans la grève générale la plus suivie de ces dernières années. Face à la stratégie collaborationniste de l’UGT (centrale syndicale minoritaire, historiquement lié au Parti Socialiste), la CGTP a encore une fois été seule à convoquer la grève.
Cependant, des tensions se sont fait jour dans la centrale réformiste, plusieurs syndicats liés à l’UGT ont eux aussi appelé à la grève, désavouant leur direction.
La grève générale était prévu à un moment clé de la vie politique portugaise, deux semaines avant le vote du budget pour 2013 et au moment même où les représentants de la troïka sont réunis à Lisbonne pour faire pression sur le gouvernement.
Les travailleurs portugais ont vécu cette année une suite ininterrompue de mauvais coups : suppression du treizième mois dans le public comme dans le privé, hausse de la TVA de 21 à 23%, privatisation de l'électricité, recul de l'âge de retraite à 67 ans, entre autres.
L'attaque porte désormais sur le Code du travail autorisant notamment les licenciements sans motif valable (dans un pays où le chômage officiel bat des records, à plus de 16%) ainsi que sur les budgets publics. Premières cibles en ligne de mire : l'éducation (moins 600 millions d'€) et la santé (moins 800 millions d'€) avec des vagues de fermeture d'écoles et d'hôpitaux en conséquence.
L'adhésion historique à la journée d'hier montre que les travailleurs n'ont guère plus d'illusion sur cette politique. De plus en plus de travailleurs comprennent que la lutte est la seule solution.
Une grève massivement suivie dans tous les secteurs, l'industrie lourde, les transports et la fonction publique en tête
Cette journée du 14 novembre a conduit à la paralysie de nombreux secteurs, dans le public comme dans le privé.
Les principales industries du pays étaient à l'arrêt. C'est le cas de 21 des 22 usines du plus grand complexe industriel du pays, celui de Volkswagen-Autoeuropa, dans la région de Setubal.
Les taux de grévistes sont historiques dans le secteur agro-alimentaire : 100% à la Centralcer (brasseries Sagres), 100% à ACRAL Torres Vedras (farines animales) et 65% dans le groupe Parmalat.
Les dernières places fortes de l'industrie lourde, sinistrée par la politique européenne de casse de l'appareil productif, ont également répondu à l'appel. C'est le cas des chantiers navals de Lisbonne (100%), de l'usine Bosch de Braga (90%), de l'usine Renault d'Aveiro (70%) ou encore de la fabrique de St-Gobain à Loures (96%).
Dans le public, la grève a été encore plus massive, en particulier dans les transports.
Le métro de Lisbonne a été totalement paralysé, tout comme les transports urbains de Porto, avec des taux de 90 à 95% dans les autres villes du pays, comme à Braga ou Coimbra.
Pour ce qui est des liaisons nationales, la grève a été suivie à 100% aux CP (la SNCF Portugaise) et dans les réseaux de transports fluviaux. 70% des vols de la TAP (Air Portugal) ont également été annulés.
Dans le reste de la fonction publique ou des collectivités locales, infirmiers et personnel hospitalier, enseignants, fonctionnaire de la Justice ou personnel d'entretien ont répondu massivement à l'appel à la grève.
Le taux de grévistes chez les infirmiers s’élève à plus de 70%. Dans l’hôpital Santa Maria, un des plus grands de la capitale, l’adhésion à atteint 55% chez les infirmiers et 80% chez le personnel administratif.
Dans l'éducation, le nombre d'écoles fermées a dépassé les chiffres de la dernière grève, les écoles restées fermées constituant l'exception.
Le succès historique de la grève ne vient pas de nulle part. La CGTP, syndicat qui maintient un lien fort avec le Parti communiste, travaille sur des bases de classe au développement de la conscience des travailleurs et désigne clairement la lutte de masses comme seule voie de changement politique et de sortie de la crise.
Depuis la dernière grève générale de mars, des actions de lutte dans tous les secteurs ont été menés, toutes les semaines.
Les grèves se multiplient dans les transports urbains des grandes villes, les ports portugais fonctionnent au ralenti depuis près de deux mois. Il ne faut pas oublier les manifestations, rassemblements, campagnes de masse menées par le syndicat.
C'est par la construction de ce rapport de force sur le terrain que des milliers de travailleurs ont fait grève pour la première fois. Que dans des certaines régions (comme à Madère), où les luttes sont historiquement plus faibles, on a rencontré des chiffres jamais vu d’adhésion à la grève.
« Le début d'une nouvelle ère » passant par le « renforcement de la lutte » pour la CGTP
Après cette journée historique, le secrétaire de la CGTP – membre par ailleurs du comité central du PCP – Arménio Carlos a appelé à continuer la lutte.
Pour le dirigeant syndical, cette grève correspond à un« véritable développement de la lutte de masses » et marque « le début d'une nouvelle ère, une ère d'espoir et de confiance » mais aussi de « renforcement de la lutte » contre l'austérité au Portugal.
Si un nouveau rassemblement est prévu dès le 27, jour du vote du Budget à l'Assemblée, de nouvelles actions devraient être définies par la commission exécutive de la CGTP, répondant aux attentes de riposte du peuple portugais.
On est loin de la ligne officielle de la CES, celle du dialogue social et de l'européisme constructif, qui conduit ailleurs le mouvement social dans l'apathie ou l'échec.
La CGTP-IN, ayant maintenu des liens forts avec le Parti communiste et conservé une ligne de classe conséquente, construit patiemment les conditions d'un rapport de force qui peut concrètement mettre en échec les plans du gouvernement et de l'Union européenne du capital.