Dans le bassin minier, Jean-Marc Tellier poursuit sa bataille contre le RN
Dans la 3e circonscription du Pas-de-Calais, seule reprise en France à l’extrême droite en 2022, le communiste repart au combat, sous la bannière du Nouveau Front populaire.
Il n’y a pas une seconde à perdre. Dans l’étroit couloir du siège du Parti communiste lensois, les militants venus de tout l’ancien bassin minier arrivent, repartent, reviennent. Les bras sont chargés. D’affiches, de tracts, de matériel de collage, et d’envie. « Ce qu’on leur a pris, on ne veut pas le perdre ! » glisse Pierre, jeune engagé, en pleine distribution d’accolades et de cafés.
Le député sortant et désormais candidat du Nouveau Front populaire, le communiste Jean-Marc Tellier, s’en amuse : « C’est la mobilisation générale ! » Il y a seulement deux ans, ce fils de mineur réussissait l’exploit de reprendre la 3e circonscription du Pas-de-Calais à l’extrême droite, l’emportant de justesse au second tour face au candidat du RN, Bruno Clavet. C’était la seule circonscription de conquête de la gauche face à un lepéniste sortant.
« À 71 voix près ! tient à préciser le communiste. N’en oubliez pas une, elles sont précieuses. » Une performance qu’il lui faudra réitérer, voire même dépasser, pour conserver son siège. Lors des élections européennes du 9 juin, Jordan Bardella a, sur cette circonscription ouvrière, recueilli plus de 52 % des voix (avec 53 % d’abstention). « Il n’y a aucune raison de ne pas croire en nous, assure Jean-Marc Tellier, qui a été maire d’Avion pendant treize ans. On va frapper à toutes les portes… Et on y arrivera ! »
Priorité à la proximité
Au nord de Lens, au centre des barres d’immeubles du quartier de la Grande Résidence, c’est justement ce que se préparent à faire, en sa compagnie, une bonne vingtaine de ses soutiens. « Surtout, on écoute les gens ! » lance Sébastien, chargé de guider les troupes mobilisées pour cette opération porte à porte.
« C’est notre méthode depuis toujours, précise Fatima Aït Chikhebbih, conseillère départementale socialiste venue prêter main-forte. Faire avec et pour les habitants. La proximité, c’est le meilleur moyen de rassembler et de contrer l’extrême droite. » Derrière les quelques portes qui s’ouvrent, beaucoup de demandeurs d’emploi, quelques femmes au foyer, des travailleurs de nuit – la plupart d’origine étrangère.
Dans les mains des militants qui grimpent les marches des tours quatre à quatre, un tract récapitule les actions menées par le parlementaire « pour protéger notre pouvoir d’achat, nos services publics, nos emplois ». À l’Assemblée nationale : proposition de loi pour baisser les taxes sur le carburant, pour l’augmentation des salaires et des retraites, pour la prise en charge intégrale des soins liés au traitement du cancer du sein…
Et en circonscription : dispositif d’aide au départ en vacances visant à permettre à 10 000 personnes aux faibles moyens de prendre le large, campagne de mobilisation contre la vie chère. Sans oublier l’arrêté empêchant les coupures d’énergie pris en concertation avec plusieurs maires ou les différentes mobilisations contre les fermetures de classes du territoire. « Je veux qu’on fasse campagne en parlant de nous, pas seulement du RN », insiste Jean-Marc Tellier.
Reste que le parti d’extrême droite est dans toutes les têtes. À Méricourt, à quelques kilomètres de là, une trentaine de personnes sont réunies sous la pluie pour commémorer l’appel du 18 juin 1940. « Il nous appartient de bâtir un avenir commun libre de toute forme de barbarie ou d’intolérance », lance à la tribune Marianne Lenne, adjointe au maire de la commune, tout de rouge vêtue.
« Ça crée autant de honte que de rage »
Outre son imposant terril, Méricourt a une particularité : si trois de ses bureaux font partie de la troisième circonscription du Pas-de-Calais – celle de Jean-Marc Tellier –, cinq autres appartiennent à la onzième, où la députée s’appelle… Marine Le Pen. « On fait ce que l’on peut pour lutter contre le vote RN et nous arrivons tout de même à limiter les dégâts tant bien que mal, observe René, 69 ans, retraité de l’industrie du chauffage, abrité sous son parapluie. Mais les votes d’extrême droite ont la peau dure. Les plus âgés votent souvent par crainte du désordre et les plus jeunes parce qu’ils n’arrivent pas à vivre de leur travail. »
Un constat que partage Corinne Taté, adjointe au maire PS de Harnes, Philippe Duquesnoy, qui mène campagne avec Jean-Marc Tellier : « On voit de plus en plus de jeunes, et même de retraités ayant travaillé toute leur vie, obligés d’aller aux distributions alimentaires. Ça crée autant de honte que de rage. Pour en finir avec le RN, il n’y a pas de secret : il faut redonner confiance et dignité à la population. Par l’emploi, donc la réindustrialisation du territoire. »
Dans le Pas-de-Calais, le taux de chômage s’élève à 9,2 %, deux points de plus que la moyenne nationale. Tandis que 28 % de ses habitants vivent sous le seuil de pauvreté, selon l’Insee. Jean-Marc Tellier résume : « Ici, on ne veut pas l’aumône, on veut se donner les moyens de vivre. »