EDT pour vivelepcf, 18 août 2012

120824_Sarko.jpgHollande, après Sarkozy, ne pourra pas esquiver bien longtemps la question de l’UE. Dans quelques mois, sa politique d’austérité « équitable » a tous les risques de se transformer en super-austérité. Le capitalisme va continuer à utiliser sa propre crise pour s’attaquer aux acquis des travailleurs pays après pays en Europe. En 2013, la France est censée emprunter 400 milliards d’euros sur les marchés. Elle affrontera la concurrence des pays, comme l’Italie, où les salaires et les droits sociaux auront été écrasés. L’UE s’apprête à être, comme contre Grèce, Espagne ou Italie aujourd’hui, à la fois le prétexte et l’instrument, avec l’euro, pour imposer cette politique au peuple français.

Mais en France, le pouvoir fait face à un obstacle particulier. En 2005, s’est déroulé un vote et la sanction populaire est tombée. Par référendum, le peuple a rejeté à 55% la « constitution » européenne qui reprenait l’ensemble des traités européens, Maastricht, Amsterdam, Lisbonne. Une claque notamment pour Hollande et Sarkozy qui avaient posé ensemble sur Paris Match pour le TCE. Le pari de « relégitimation » de l’UE a échoué. Bien sûr, gauche et droite se sont entendues pour adopter au Parlement en 2008 le Traité de Lisbonne avec l’essentiel des dispositions techniques du TCE (pas toutes, notamment pas l’inscription directe dans la loi française des directives européennes).

Mais, aujourd’hui plus encore, avec l’expérience de l’intrusion de l’UE et de la BCE sur les pays voisins, le discrédit à 55% de l’UE demeure. Un potentiel de résistance et de contestation notamment de l’euro existe et peut être développé. Une majorité encore plus large pense que l’euro a été une mauvaise chose.

Face à cette situation, l’idéologie dominante a adapté son discours, a temporisé. Sarkozy a très peu utilisé le prétexte européen pour faire passer ses contre-réformes. Sarkozy, puis Hollande ont adopté une posture de fermeté face à l’Allemagne d’Angela Merkel.

Surtout les partis du système ont tout fait pour minimiser, esquiver la question européenne pendant l’interminable campagne électorale de 2012.

Le système a confié au FN le soin de jouer son rôle habituel de repoussoir pour discréditer toute idée de rupture avec l’UE. Le Pen fille n’a pas eu à le mener jusqu’au bout, abandonnant la question de l’euro dans sa profession de foi. L’absence des positions historiques du PCF, celles qui ont alimenté nos campagnes contre Maastricht notamment a pesé lourd, avec le choix de la direction du Parti de l’effacement dans le Front de gauche, de l’alignement derrière le PGE, la CES et le Maastrichien, « fédéraliste », Mélenchon.

Les élections passées, Hollande réintroduit la question européenne avec l’adoption du Pacte budgétaire. Sur le plan politicien, il s’est débrouillé pour l’associé dans un « paquet », soumis au vote des députés et sénateurs, comprenant un volet « croissance » qui permettra à la gauche de se différencier de Sarkozy. Notons, au passage, que ce volet « croissance » n’est qu’un instrument de plus dans l’intégration dans l’UE du capital.

Le Pacte budgétaire est avant tout un instrument politique pour mettre une pression européenne sur les peuples. Son nom de code, en jargon européen, est « TSCG » pour « Traité sur la coopération et la gouvernance de l’Union économique et monétaire ». Mais il n’est en rien comparable aux traités de Maastricht ou de Lisbonne. Il ne concerne que 25 pays sur 27 (Royaume-Unis et République Tchèque ne l’ont pas signé). Il ne reprend pas les traités antérieurs. Il ne s’y substitue pas.

Il ne contient en fait que la reprise de la partie du Traité de Maastricht concernant les conditions de déficit et de dette publics pour adhérer à l’euro. Pour les capitalistes européens, ces fameux « critères de Maastricht » ont été bien politiquement très utiles pour compresser les dépenses publiques et sociales, les salaires, tout au long des années 90. Mais dans les faits, ils n’ont quasiment jamais été respectés par un seul Etat membre. Aujourd’hui, ils ont perdu leur efficacité politique.

Le premier objectif du TSCG est de réaffirmer solennellement les critères de Maastricht dans le contexte dramatisé de « crise de l’euro ».  La propagande fonctionne à plein : pour diminuer les déficits publics (creusés par les gouvernements eux-mêmes au profit des capitalistes), pour préserver l’UE et l’euro, il faut adopter le TSCG. Une fois le TSCG adopté, le gouvernement n’aurait plus de marges de manœuvre pour faire d’autres choix que l’austérité. Sous peine de sanctions européennes. On ne connaît que trop ce discours de défausse des gouvernements français. Répétons-le, jamais, les « critères de Maastricht » n’ont été observés mais jamais l’UE n’a pris le risque d’imposer les sanctions prévues à un peuple.

Non, l’atteinte véritable à la souveraineté nationale, à la capacité des peuples à résister au capitalisme, est ailleurs : elle est dans la monnaie unique, l’euro. L’échelon national est dépossédé de sa maîtrise. Au bout de 10 ans, tous ce que, communistes, nous avions dénoncé en combattant Maastricht se produit, la mise en concurrence exacerbée entre les peuples, l’écrasement des activités, des industries des pays les plus faibles, la baisse accélérée des salaires et des droits sociaux etc. La « crise de l’euro » est maintenant à la fois le moyen d’aggraver encore ses effets mais aussi de préparer un renforcement de la tutelle de l’UE du capital sur les peuples avec une intégration bancaire puis budgétaire. NON ! Nous avons dit à non à cela à 55% !

L’autre objectif du TSCG, c’est bien que l’on ne touche pas à l’euro, au consensus pour la sauvegarde l’euro.

Voilà pourquoi, y compris pour lutter contre l’application du TSCG, c’est une fausse-bonne idée, une erreur, voire une tromperie de demander un référendum sur le TSCG, comme le font, après avoir soigneusement attendu l’élection de Hollande, des associations de la « gauche de la gauche », Copernic, Attac ou le Front de gauche.

Non, le TSCG n’est pas un nouveau Traité de Maastricht ou de Lisbonne. L’ériger au même niveau, c’est rentrer dans l’opération politique du pouvoir et de l’UE. C’est dévaloriser les 55% de 2005, le point d’appui pour lutter contre la légitimité et la fatalité de l’application traités, directives et règlements européens, y compris le TSCG lui-même.

Les propos tenus par Pierre Laurent dans son interview à Nice Matin le 15 août sont gravement inconséquents : « L’enjeu est encore plus important que pour le traité de Maastricht il y a vingt ans, qui était déjà une erreur monumentale. » Pierre Laurent décide d’effacer la portée fondamentale de Maastricht. C’est conforme avec l’abandon de la contestation de l’euro et la conversion, avec le PGE, à la « réorientation » de l’UE. Comme dit le chanteur, « une erreur, c’est facile comme un et deux font quatre ». Maastricht, une erreur ? Mitterrand ne savait pas ce qu’il faisait peut-être ! Pour Pierre Laurent, il s’agit sans doute le moyen de gommer le fossé qui sépare les communistes des socialistes comme Mélenchon, chantre en 1992 de Maastricht, qu’il qualifia de « bon compromis de gauche ».

Dans les luttes à venir, l’abandon du point de vue communiste contre l’UE est désastreux.   

A 55%, les Français ont dit NON à tous les traités de l’UE. On leur demanderait maintenant de se prononcer sur une petite partie, un codicille.

Réduire le débat européen au texte du TSCG, oui ou non, c’est rentrer dans le faux débat promu par le système sur les déficits publics. Dans le détail, le TSCG reprend exactement les critères de Maastricht « en vigueur » : 3% du PIB de déficit maximum et 60% de dettes publiques. Le seul point ajouté est une limite de déficit « structurel », c’est-à-dire du budget de fonctionnement, de 0,5% du PIB, sauf circonstances exceptionnelles. On voit le danger de rentrer dans le débat technique !

Communistes, nous ne sommes pas par principe pour des déficits publics mais pour prendre l’argent là où il est, le choix des déficits pouvant se justifier pour certains investissements. Notre problème n’est pas d’abord de s’opposer à la réduction des déficits mais qu’elle se fasse par des prélèvements sur la production de richesses détournée par les capitalistes.

La pétition de l’Huma reprend la notion de souveraineté nationale qui cesse enfin d’être confondue avec le nationalisme. Mais la perte essentielle de souveraineté ne réside pas dans les dispositifs de « sanctions » théoriques, politiques, qui seront aussi peu appliqués que ceux prévus par Maastricht mais bien dans la monnaie unique, l’euro.

On s’étonne que les promoteurs du référendum sur le TSCG ne se soient réveillés qu’après l’élection de François Hollande. Les uns et les autres ont fait semblant de croire, ont voulu faire croire que Hollande « renégocierait » le Pacte budgétaire, autrement qu’il ne l’a fait. C’était aller contre toute évidence. Le résultat de ce travail de rabattage pour Hollande est de faciliter sa position aujourd’hui pour faire passer le TSCG. Et puis, le seul fait d’imaginer que le TSCG soit « renégociable » en dit long sur l’adhésion profonde à la fatalité de l’UE du capital.

Evidemment, de référendum, il n’y en aura pas. L’affaire sera pliée au Parlement en quelques semaines. Mais comme Pierre Laurent le laisse entendre, l’objectif est sans doute ailleurs : « il faut qu’un nombre important de parlementaires de gauche s’opposent à cette ratification lors du vote en septembre ». L’initiative sur le TSCG s’inscrit dans la recomposition politique visée par le Front de gauche, comme par le PGE en Europe (ex : Syriza), constituer des « partis socialistes de gauche » pro-européens.  L’ex-rocardienne Lienemann est déjà sur les rangs pour rejoindre Mélenchon. Hamon et Montebourg, qui font paraître des états d’âme sur le TSCG, seront les contestataires de demain. Les parlementaires « verts » (élus par le PS…), chacun au nom de l’amour de l’UE, se répartissent les positionnements. On se souvient que, pressentant le résultat, le PS n’avait pas mis tous ses œufs dans le même panier en 2005 en délégant les Maastrichiens Fabius, aujourd’hui ministre des affaires étrangères, Bernard Cazeneuve, aujourd’hui ministre des affaires européennes ou Mélenchon pour canaliser le Non.

Depuis des mois, avec d’autres membres du Conseil national du PCF, des centaines de responsables et militants, nous demandons qu’une véritable initiative nationale pour la rupture avec l’UE du capital et la remise en cause de l’euro soit engagée par notre parti, dans la suite de ses positions historiques, notamment contre Maastricht, validées par l’expérience. A chaque niveau, nous nous sommes heurtés à des responsables sourds. Au CN, le débat a été refusé, comme il n’a jamais été discuté de l’initiative actuelle, tombée d’en haut, c’est-à-dire de la direction du « Front de gauche ». L’Humanité nous a envoyé la même fin de non-recevoir alors qu’abondent les tribunes des dirigeants du PG.

Aujourd’hui, plus que jamais, dans le cadre de la discussion nécessaire sur les moyens de faire échec au TSCG, nous remettons en avant notre appel et les propositions de campagnes que notre parti devrait porter :

-          Refus de l’application des traités, directives et règlements européens illégitimes

-          Nationalisation du secteur financier national

-          Dénonciation de la dette publique indue

-          Abandon de l’euro, qui dans le cas de la France, veut dire fin de l’euro et recouvrement des souverainetés monétaires nationales

-          Coopération monétaire via une monnaie internationale commune entre pays de l’UE ou non.

Contre l’alliance européenne des capitalistes, la résistance au plan national est décisive dans l’intérêt mutuel,internationaliste, des peuples!