Initiative sur la guerre au Mali dans le 15ème : des analyses africaines éclairantes pour mener la lutte contre l'intervention française
Initiative sur la guerre au Mali dans le 15ème
Des analyses africaines éclairantes pour mener la lutte contre l'intervention française
Compte-rendu pour http://jeunescommunistes-paris15.over-blog.com/ et http://solidarite-internationale-pcf.over-blog.net/
Une trentaine de jeunes communistes, du 15ème et d'ailleurs, sont sortis renforcés dans leurs convictions militantes ce jeudi 28 février de cette rencontre avec des camarades algériens et maliens sur l'analyse à faire du conflit au Mali pour mener la lutte contre l'intervention en France.
Une initiative qui s'inscrit pleinement dans notre campagne devant les lycées, dans les quartiers, aux portes des entreprises, dans les cités U contre la guerre au Mali insistant autant sur l'hypocrisie du discours de la « guerre contre la terreur » que sur le coût financier et humain de la guerre.
Les analyses de nos camarades William Sportisse, responsable du Parti algérien pour la démocratie et le socialisme (PADS) et Mohammed Diarra responsable en France du parti malien SADI (Solidarité africaine pour la démocratie et l'indépendance) ont été de précieuses contributions.
Du Mali, comprendre les origines françaises de la crise pour éclairer sur les mécanismes de l'intervention néo-coloniale
Mohammed Diarra a rappelé les positions de son parti, qui entretient des relations privilégiées avec les forces communistes bien qu'étant lui-même un parti « de gauche anti-impérialiste », et ses mises en garde contre l'intervention néo-colonialiste française.
Il a surtout rappelé les origines lointaines de la tragédie malienne. Les espoirs du « socialisme à la malienne » de Modibo Keita, soutenu par l'URSS et premier soutien de l'Algérie libre. Des espoirs assassinés en 1968 par un coup d’État fomenté par la France.
Les manœuvres constantes de la France depuis l'indépendance : d'abord les visées du général de Gaulle sur le Sahara algéro-malien et son pétrole, ensuite le soutien constant au mouvement indépendantiste touareg, enfin les politiques d'ajustement structurel patronnées par le FMI.
Le chaos de l'année 2012 au Mali trouve une cause concrète souvent occultée :les accords d'Alger de 2006signés entre le mouvement touareg et l’État malien, sous patronage algérien.
Ces accords ont conduit à la démilitarisation du Nord-Mali, permettant l'implantation de groupes islamistes, non seulement AQMI mais aussi MUJAO et Ansar Dine, réalisant des trafics en tout genre avec le regard bienveillant de l’État malien corrompu d'Amadou Toumani Touré (ATT).
Ces accords constituent le cadre qui ont rendu possible la crise de 2012. D'abord la rébellion touareg de janvier, alliée aux islamistes, mettant en déroute une armée malienne corrompue, sous-équipée, souffrant en hauts lieux de connivences avec les bandes voyous islamistes.
Dans ce contexte d'une armée en déroute, d'un système corrompu et de menace islamiste sur l'intégrité du pays, le coup militaire du capitaine Sanogo le 22 mars, avec ses contradictions, a été perçu comme un soulagement par le peuple malien.
Ce coup, condamné par les puissances occidentales, a servi de prétexte à une « révolution de palais », avec le remplacement d'ATT, et son système à bout de souffle, par un ami de la France, Dioncounda Traoré.
Les manœuvres politiques, pilotées par la France, ont été mises en œuvre par la CEDEAO (Communauté économique des Etats d'Europe de l'ouest), gérée par le dictateur burkinabé Blaise Compaoré.
La junte, mise au ban de la communauté internationale, a dû concéder le 6 avril l'accord-cadre, avec l'installation comme président par intérim de Dioncounda Traoré et premier ministre de transition de Cheik Diarra, deux politiciens à la double nationalité malienne et... américaine.
Le SADI a toujours prôné une solution malienne à la crise malienne. Il a dénoncé les manœuvres visant à priver l'armée malienne des moyens de se défendre contre la menace islamiste : les cargaisons d'armes à quai dans les pays voisins, l'armée dépourvue de munitions sur le terrain.
M.Diarra a rappelé que le MNLA touareg a été vaincu sur le terrain par l'armée, que les islamistes ont profité de la crise pour conquérir une position dominante, rendant la situation invivable dans les villes du Nord.
Il s'agissait de préparer la population à l'intervention en médiatisant à outrance les horreurs vécues au Nord. Le SADI est toujours resté ferme sur le principe de non-ingérence, sur une solution malienne à la crise.
Aujourd'hui, en 2013, la situation est critique.
La France empêche toujours l'armée malienne d'entrer à Qidal, laissant les touaregs du MNLA patrouiller dans les rues. Un mouvement qui a proclamé l'indépendance de l'Azawad en France, soutenu au début de la rébellion par le ministre des affaires étrangères Alain Juppé.
La France décide de tout, sous mandat de l'ONU. La mission MISMA se pose commeforce d'interposition entre Nord et sud Mali, préparant sous le modèle soudanais, la partition du pays avec l'enjeu des matières premières au Nord : uranium, pétrole, or.
M.Diarra dénonce enfin les collusions entre des islamistes financés par le Qatar et la France qui profite de la déstabilisation pour légitimer cette intervention, la « sainte alliance des fous d'Allah et des fous du profit », pour reprendre son expression, des manœuvres déjà vues en Syrie ou en Libye.
Depuis l'Algérie, la meilleure des solidarités est de mener la lutte dans son pays contre les tendances pro-impérialistes
L'analyse, aussi lucide que combative, de notre camarade William Sportisse du PADS est venue nous confirmer les enjeux régionaux de la crise, avec la menace portant sur l'Algérie ainsi que l'attitude ambiguë de la classe dirigeante algérienne.
Notre camarade a dévoilé l'hypocrisie du discours sur l'intégrité du Mali, au moment où se déploie de fait une occupation du Nord-Mali par la France.
Rejoignant M.Diarra, William Sportisse a souligné que les mouvements réactionnaires à façade religieuse étaient financés par nos amis du Qatar et d'Arabie saoudite, tout comme le MNLA est piloté par la France.
L'intervention impérialiste en Libye a été la condition préalable de celle au Mali, en conjonction avec un lent processus d'affaiblissement de l'Etat malien.
Le Mali et ses richesses attisent les convoitises des multi-nationales. Sous la tutelle du FMI, les plans d'ajustement structurel ont appauvri un pays au sous-sols si abondants. Cinq millions de personnes souffrent aujourd'hui de la faim tandis que le pays est dramatiquement endetté.
Dans cet État qui a été sciemment affaibli, les impérialistes occidentaux attisent les divisions ethniques et religieuses pour mieux assurer leur domination.
Notre camarade algérien a rappelé que la région constitue un espace décisif pour le contrôle de l'Afrique, et dans le dispositif d'encerclement de l'Algérie. La prise d'otage d'In-Amenas, avec ses zones d'ombre, visait à faire céder l'Algérie aux pressions interventionnistes occidentales.
La classe dirigeante algérienne est, elle, divisée.
D'une part, une fraction « compradore » prête à céder aux sirènes de l'OTAN cherchant à en faire un second Pakistan en Algérie, garante de l'ordre impérialiste dans la région.
D'autre part, une fraction « patriotique » petite-bourgeoise, attachée à l'héritage du FLN et du mouvement de libération, déterminé à ne pas céder à l'impérialisme occidental.
Dans cette lutte, les communistes algériens mènent le combat contre les manœuvres de l'OTAN, travaillent à la reconstruction de l'organisation communiste en Algérie et pratiquent la solidarité de fait avec le peuple malien : la lutte en Algérie pour la paix et contre l'impérialisme
C'est sur ce mot d'ordre combatif que l'initiative s'est achevée, après un débat riche et nourri, où les jeunes militants ont poussé les intervenants à préciser encore leurs riches exposés :
la meilleure des solidarités avec le peuple malien, c'est mener la lutte en France contre l'intervention française, à partir d'une organisation communiste que nous re-construisons dans notre travail militant !
NB : Les exposés des deux intervenants seront bientôt mis à disposition sur le site Solidarité-Internationale-PCF