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Le blog de pcfmanteslajolie

Eugene McCartan (PC d’Irlande) sur la Grande-Bretagne et l’Irlande, l’UE et l’impérialisme.

6 Janvier 2017, 09:40am

Publié par pcfmanteslajolie

 

Eugene McCartan (PC d’Irlande) sur la Grande-Bretagne et l’Irlande, l’UE et l’impérialisme.

Discours d’Eugène Mac Cartan, secrétaire général du Parti communiste d’Irlande, prononcé lors du 54ème congrès du Parti communiste de Grande-Bretagne, en novembre 2016, traduction MlN pour « Solidarité internationale PCF – Vivelepcf »

Camarades,

Au nom du Parti communiste d’Irlande, je voudrais vous adresser l’expression la plus chaleureuse de solidarité au Parti communiste de Grande-Bretagne et, en particulier, aux délégués qui participent à ce 54ème congrès de votre parti.

C’est toujours un plaisir d’assister à des événements organisés par votre parti, un parti avec lequel nous partageons un grand nombre d’intérêts communs et de convergences de vue, puisque nous faisons face au même ennemi : l’impérialisme britannique.

Camarades,

C’est une époque de défis pour le mouvement ouvrier, ici en Grande-Bretagne, en Irlande et dans le monde. Notre classe continue à faire l’expérience quotidiennement de l’attaque incessante du capitalisme monopoliste contre les acquis de la classe ouvrière gagnés par des luttes dures et âpres et par tant d’abnégation. La résistance de la classe ouvrière a été, d’une manière générale, lente à s’affirmer, mais, maintenant, elle progresse en intensité à travers l’Europe. Dans cette lutte, les communistes et la gauche ont de nouveaux enseignements à tirer.

Votre congrès arrive à un moment important alors que la classe dirigeante britannique et l’Etat britannique sont toujours confrontés à la suite de la décision, par référendum, de quitter l’Union européenne. Les conséquences du « Brexit » ont eu et auront un impact profond sur la vie des travailleurs aussi bien dans l’Etat britannique que, bien sûr, en Irlande, au nord et au sud.

Et elles ont un profond impact sur l’Union européenne elle-même. Les médias britanniques, irlandais et internationaux se sont efforcés de travestir les motivations de ceux qui ont voté pour la sortie en une sorte de rejet droitier et raciste de l’UE. Mais la vision mondialement propagée qu’aucune personne équilibrée, à la pensée libérale, pourrait soutenir la sortie de l’Union européenne est maintenant remise en question dans toute l’UE.

  1. « Brexit » n’a pas été et n’est pas seulement un phénomène de droite. L’expansion de l’idéologie de droite à travers l’Europe est le résultat direct de l’abandon [en fuyant] par la gauche de l’anti-impérialisme, laissant la voie ouverte au populisme de droite, tels que l’expriment Trump, Le Pen et Farage.

La décision du peuple de Grande-Bretagne de quitter l’Union européenne pose de grandes difficultés à l’UE et a suscité également la panique dans la classe dirigeante irlandaise. La soumission de celle-ci à trois centres de pouvoir à la fois – à Londres, à Bruxelles et à Washington – la met dans un état d’extrême confusion.

Le Sinn Fein, qui s’était opposé auparavant à l’intégration européenne, a mené une campagne opportuniste dans le Nord de l’Irlande dans le camp du « maintien », pour rendre possible sa cooptation dans les stratégies et mécanismes de contrôle du système en Irlande et dans l’Union européenne. L’ « engagement critique » réformiste de gauche, que revendique maintenant le Sinn Fein, est bienvenu au club.

Les partis de l’exécutif d’Irlande du Nord, loin de rechercher plus de pouvoir sur l’économie, préfèrent renvoyer la décision à l’Etat britannique tellement ils craignent d’endosser la responsabilité des politiques dictées par le gouvernement britannique et qu’ils appliquent. L’impopularité de ces politiques, qui frappent durement la classe ouvrière, a déjà altéré le soutien politique au Sinn Fein.

En République d’Irlande, les travailleurs ont été amenés à une campagne de résistance de masse contre l’introduction de la taxe sur l’eau qu’ils ont vue comme un prélude à la privatisation. Le niveau de la résistance d’un grand nombre de syndicats et spécialement d’associations locales [community groups] a contraint le gouvernement à faire marche arrière et à renoncer à collecter cet impôt injuste.

La campagne pour le droit à l’eau a élevé l’exigence et a engagé la campagne pour un référendum en vue d’inscrire la propriété et le contrôle populaires de notre eau dans la constitution de l’Etat, une exigence que le PCI a défendue et propagée depuis le tout début de la lutte. Cette campagne a été si forte que la résolution est passée au « Dail Eireann » [Assemblée d’Irlande] sans opposition et que le projet de loi est passé au stade de l’examen en commission. Un référendum sur la propriété de l’eau, s’il s’en tient un, constituerait un obstacle majeur aux plans de la classe dirigeante irlandaise, de l’UE et au TTIP.

Ces luttes importantes doivent servir à développer la conscience des travailleurs, en particulier en cette année du centenaire de l’Insurrection de 1916, conscience que le combat contre l’impérialisme n’appartient pas au passé mais doit être placé au cœur de leurs luttes quotidiennes, conscience que pour obtenir des avancées dans les luttes sociales, celles-ci ne peuvent pas être séparées (elles sont interconnectées avec elle) de la rupture avec le triple verrou de contrôle impérialiste – Grande-Bretagne, UE et Etats-Unis – sur la destinée du peuple irlandais.

Nous venons juste d’assister en Irlande au scandale impliquant le géant Apple, qui a déversé ses profits mondiaux sur une adresse irlandaise pour éviter de payer des impôts – cela en connivence avec le gouvernement irlandais et avec son soutien. Ces profits provenaient de la surexploitation de travailleurs sous-payés du monde entier.

En regardant Apple et les firmes transnationales en général, nous pouvons discerner les tendances à une plus large interconnexion qui façonnent les économies aussi bien des Etats impérialistes puissants du centre que des Etats plus faibles de la périphérie.

En périphérie, on observe la surexploitation de travailleurs sous-payés et la captation de la rente impériale au moyen d’avantages financiers et structurels et de l’évasion fiscale, aboutissant à des profits massifs pour les grandes firmes. Dans le centre impérialiste, on observe un déclin des salaires, une baisse nominale de la taxation du capital et de la taxation des entreprises, aboutissant, de même à des profits massifs.

Dans les deux cas, nous observons un transfert de richesses massif de la classe ouvrière vers les firmes transnationales et le déplacement de la charge fiscale des entreprises vers les épaules des travailleurs, aboutissant à une réduction des services publics socialisés et à leur remplacement par des services privatisés, marchandisés, tournés vers le profit.

Ce modèle de développement économique et social est maintenant soumis à la pression croissante d’événements hors du contrôle de la classe dirigeante irlandaise : l’impact possible du Brexit, la volonté de la Commission européenne d’harmoniser le niveau de l’impôt sur les sociétés d’ici 2021 et l’élection de Trump aux Etats-Unis.

La nature dépendante et périphérique de l’Etat irlandais dans la structuration du pouvoir dans l’UE va apparaître de plus en plus visiblement si la Grande-Bretagne se retire dans les quelques prochaines années.

Comme le président du syndicat de l’électricité et de l’ingénierie technique, Frank Keoghan, parlant à la conférence annuelle de son syndicat le week-end dernier, l’a constaté : « parce que c’est l’UE, agissant sur la base du vote à la majorité qualifiée (L’Irlande dispose de 0,6% des voix), qui va décider des relations futures de l’Irlande avec à la fois la Grande-Bretagne et l’Irlande-du-Nord et non notre gouvernement agissant indépendamment ».

Les conséquences du Brexit pour l’ensemble de notre peuple, au nord comme au sud, pourront être lourdes. Ni la population des six comtés du nord, ni la population de la République – pays soi-disant souverain – n’auront d’influence réelle et de droit à la parole sur les événements qui se déroulent.

Le projet d’intégration européenne a heurté un rocher, s’avérant incapable de trouver une réponse viable à la crise économique et sociale. Il ne s’ensuit pas pour autant que la droite populiste et les réformistes sociaux présentent une quelconque alternative.

Il est de la responsabilité de la gauche, spécialement des partis communistes, de produire des politiques capables d’organiser la résistance des travailleurs et leur mobilisation pour un changement radical, ouvrant la voie au socialisme.

« Le vieux monde se meurt et le nouveau monde tarde à apparaître ».

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